Une nouvelle pépite
Chaque nouveau livre d'
Emily St John Mandel est attendu avec impatience d'autant plus quand il flirte allègrement avec les franges de l'imaginaire.
La Mer de la Tranquillité réussit le tour de force d'être à la fois un roman autofictionnel, une incursion dans son précédent roman l'
Hôtel de Verre, l'histoire de son possible aïeul, le tout sur fond de voyage temporel et d'hypothèse de simulation.
La Mer de la Tranquillité mêle quatre époques distinctes reliées entre elles par un phénomène étrange qui semble toujours se reproduire de la même façon, à savoir une sorte d'hallucination où quelques personnes entendent une berceuse au violon accompagnée d'un bruissement évoquant un engin volant qui décolle. Cette expérience aussi brève qu'intense déroute ceux et celles qui la vivent.
Roman choral qui commence au Canada en 1912, quand Edwin St John St Andrew, héritier d'une famille anglaise est exilé au Canada, se poursuit un siècle plus tard avec Mirella et son amie Vincent - héroïne du précédent roman, avant de retrouver Olive Llewellyn, une romancière sélénite en tournée sur Terre au début du XXIIIème siècle alors qu'une pandémie mondiale se déclare, et qui se termine en 2401 avec Zoey une éminente scientifique de l'Institut du Temps qui enquête sur les anomalies perturbant la trame temporelle, aidée de son frère Gaspery Roberts.
Derrière la multitude de fils narratifs qui finiront par se rejoindre... (ou pas !), Emily St John Mandel dresse avant tout une galerie de personnages écorchés par la vie et met en avant les rapports humains, mais n'oublie pas de construire habilement son intrigue jusqu'au dénouement final aussi surprenant que cohérent. Tous les éléments du récit s'imbriquent parfaitement dans la conclusion, l'autrice allant même jusqu'à expliquer une scène secondaire de son précédent roman (celle sous le pont !) liant les deux histoires entre elles. (A noter que s'il n'est pas indispensable d'avoir lu L'Hôtel de Verre avant La Mer de la Tranquillité, c'est un plus indéniable dans la compréhension de l'ensemble. Si vous lisez celui-ci en premier, vous n'aurez plus la surprise puisqu'elle y divulgâche la totalité de l'histoire).
Connue pour ses constructions alambiquées et déstructurées, Emily St John Mandel nous livre ici une narration toujours éclatée mais beaucoup plus facile à suivre, servie par une plume acérée et efficace. Tout en délicatesse et en subtilité, La Mer de la Tranquillité est le roman le plus introspectif de l'autrice où derrière chaque mot, chaque phrase, la mélancolie du temps qui passe se fait ressentir.
La Mer de la Tranquillité est une nouvelle petite pépite de l'autrice, un voyage au-delà du temps sur ces instants qui marquent la vie.
Comments
Post a Comment